Dans cette phrase un peu énigmatique, je résume mon être par référence à un passé ontologique (le mien) du Passé, et à un présent existentiel (qui m’est propre) du Présent : réceptacles d’éventuelles et multiples existences futures. Dans cette construction, le Soi-je se présente telle une somme singulière objectivée dans le cadre sociétal (Lost Emery) et archivée dans l’Histoire courante.
La notion d'être ne se limite pas à ce qui est vivant ; la pierre est, néanmoins elle n'est pas vivant. Je crois pouvoir résumer l’existentiel par la subjectivité qu’il imprime chez l’être vivant lorsqu'il se perçois dans une émotion typique d'une situation affective dans ses rapports avec son milieu. En somme l’existentiel est, mais il est seulement psychologique et surtout il est changeant. Je pense que le végétal et l’animal existent, ne serait-ce parce qu’ils connaissent la jubilation et le stress, l'ivresse de la joie et l'attachement à ses pairs. De même, l’être vivant correspond à un certain potentiel biologique concret, et correspond à de multiples devenirs possibles susceptibles d’être activés dans l’existentiel. Ainsi, un être vivant connait de multiples existences plus ou moins éphémères au cours de sa vie. L’Etre c’est être produit dans, et par une histoire et ce passé aspire à se traduire présentement par des rapports environnementaux. Cette production historique se concrétise dans le corps sur deux niveaux : l’Histoire spécifique et l’histoire ancestrale familiale plus personnelle, les deux formant la base immuable de l’être-sujet multi-existenciel. L’être humain représente une valeur, une qualité comportementale et relationnelle, une élaboration fondée sur l'espèce homo sapiens, l'homme, à l’intérieur des cadres éco-systémiques propres à l’espèce : les biotopes culturels.
« Ce n’est pas seulement notre anatomie et notre physiologie qui sont animales c’est aussi notre âme et notre esprit ». (E. Morin, La Vie de la Vie.) Je pourrais ajouter qu'un système de société active autant l'animalité qu'il est barbare, c'est à dire fondé sur des rapports de force.
Nous pouvons ainsi voir la Terre comme sujet-objet d’un processus transformateur en interrelation avec l’espace cosmique. La Terre, berceau de l'espèce homo, est le théâtre de cette transformation permanente, composée d’une hiérarchie de systèmes organisés imbriqués les uns dans les autres, à la façon des poupées russes, tous en interrelation depuis le plus petit de ses éléments fondamentaux, l’atome, jusqu’à nous, homo sapiens. Or, grâce à la culture scientifique, l'être humain élargis le processus jusque dans le cosmos, par des observations, à l'aide de machines capables de voir sur des distances égales à des milliards d’années lumières. La science agît bien au-delà des limites de notre planète. Nous constatons que le rôle du système homo sapiens est prépondérant dans ce processus transformateur. A travers ses activités l’homme est en train de remplacer le champ du sensible purement chimique par du sensible bioinformatique, du biologique de synthèse, du nano biotechnologique… Il est lui-même le sujet-objet de cette évolution matérielle.
Sur Terre, le vivant exprime un certain état évolué de la matière, un état-fonction épidermique, plastique, hyper réactif (agissant sur des durées temporelles ultra rapides, par comparaison aux réactions géologiques beaucoup plus lentes) : cette couche est la Matière Sensible, MS. Je dis Matière Sensible par rapport à matière inerte (la pierre). Elle forme une enveloppe épidermique, une couche créatrice à la surface du globe. Elle est une frontière poreuse sélective d’ échanges entre l’espace atmosphérique, et le milieu tellurique, la Nature. Les individus humains formant cette couche sont des cohésions d’unités spécifiques, des individus-sujets qui, à leur échelle, sont également délimités entre eux par leurs enveloppes-frontières corporelles relationnelles. L’ensemble énergétique du vivant est à la fois influencé, contraint par l’inertie d'une part, et source de transformation: ils aspirent violemment à s’affranchir des lois cosmiques, parce qu'ils les ignorent et ne savent donc pas les exploiter.
Je dis MS relativement à matière inerte et non existentielle de la pierre. En ce qui concerne les océans, même s’il est vrai qu’ils abritent la vie dans leurs profondeurs, les effets de cette vie maritime se déterminent toujours par la MS, à la surface des eaux, et relationnent ainsi avec le terrestre. La MS possède la faculté de relationnement en soi, et, simultanément, relationne avec l’inerte terrestre et spatial. Cet épiderme vibratoire est la frontière qui distingue la relative inertie terrestre (relative par rapport au vivant) et celle de son atmosphère. Il y a aussi relationnement entre l’inerte terrestre et l’inerte spatial grâce à cette couche-frontière. Il y a donc de multiples formes d’échanges entre l’inerte terrestre, la Matière Sensible (auto-dialectique), et l’espace. Cette dialectique inter matérielle et spatio-temporelle, est donc active sur plusieurs échelles de durée. Le temps spatial, le temps terrestre, le temps du vivant, l’ensemble étant inscrit dans un tempo évolutif commun, débouche sur la physis, synthèse issue de l’association de l’inerte et de la MS, élaborant des formes spécifiques fonctionnelles : les règnes végétal et animal. Ces formes sont fonctionnelles car elles participent à un processus de transformations et de créations, et comme nous le verrons, contribuent sans doute à l’évolution de la matière globale. Cette physis, vibrante, douée d’un polymorphisme interne et externe adapté à la relative rapidité temporelle des variations de la MS, s’objective, dans des cadres dits organiques. A noter si besoin l’importance du paramètre temporel mettant en évidence que chaque partie de l’ensemble débouchant sur la physis (l’espace, la Terre-satellite et la matière sensible) s’exprime sur des temporalités différentes, de la plus lente à la plus rapide. En fait ces espace-temps sont imbriqués et interdépendants. La physis elle-même possèderait sa propre temporalité. Ces notions seront développées ultérieurement.
La vie est en soi, un vaste réseau de structures solides de densités très variables, elles sont animées et se stimulent, s’influencent, se contraignent, se charment et se rejettent, s’associent les unes les autres dans des processus de relationnement, de transmissions biologiques, et de traitements informationnels comportementaux. Rien de bien différent que ce qui se passe dans les interactions thermonucléaires à l’intérieur des galaxies, excepté cette animation qui elle, est caractéristique de la MS. A propos de l’origine de la formation de la matière sensible rien ne contredit l’hypothèse que celle-ci se manifeste aussi en dehors et très loin de notre planète. Elle a qui sait, un certain rapport avec la matière dite noire que la science découvre depuis peu. Par ailleurs, si, sur la planète Terre la MS a contribué à élaborer le monde vivant, rien ne nous oblige à ne point envisager qu’elle contribue, ailleurs, à d’autres formes sensibles non biologiques. En tout état de cause quelque chose, sur cette Terre, a bien permis le passage de l’inerte à l’animé.
Interactivité entre inerte et vivant.
De par l’hyper réactivité de la MS, couche émettrice- réceptrice vibratoire, les interactions sont morphiques : productrices d’anatomies-fonctions. Les espèces, et principalement les végétaux, induisent également des variations géo-climatiques environnementales et influencent implicitement et explicitement ces dernières. Les anatomies-fonctions sont également comportementales ; cela signifie mouvantes et objectives dans leurs émissions-réceptions informationnelles créatives. N’oublions pas que la plante, l’arbre, bien qu’enracinés, se comportent au même titre que l’animal, dans et avec leurs milieux biotopiques. Ce vaste réseau du vivant est subdivisé en sous-réseaux, eux-mêmes divisés …etc. Au niveau du vivant, si l’organisation est possible c’est grâce à la plasticité morphique de la Matière Sensible. C’est grâce à cette plasticité qu’apparaissent de nouvelles morphes anatomico-fonctionnelles. La vie s’objective dans les cadres systémiques organisés où ont lieu tous les processus-événements internes et externes relatifs aux incessantes variations des relationnements, (ou de la mixité) à l’intérieur des biotopes et écosystèmes. Cela est valable depuis la bactérie jusqu’à l’homme.
Chacun de ces domaines et secteurs est autonome : individué. Les individus-espèces sont des contenus collectifs qui se déclinent en corps distincts, lesquels se comportent librement et singulièrement dans leur biotope, de la même façon que le fait la cellule dans son environnement organique. Cette liberté étant relative dans son rapport aux contraintes et relative à son anatomie-fonction. Une cellule du foie ne va pas se promener parmi les lymphocytes ! Il est important de souligner ici que chez l’homme, où tout est beaucoup plus complexe, une anatomie-sujet ne se comporte pas en permanence dans des activités pour lesquelles elle est cependant a priori conformée. C’est bien ce qui fait à la fois le drame, l’espérance et la complexité de l’espèce humaine qui semble contenir en elle toute l’immense variété du vivant ! Une anatomie-sujet humaine, disons un OBIS, ne vient pas au monde comme l’insecte, le poisson ou n’importe quel autre être vivant spontanément, naturellement venu au monde. Et il n’est pas rare de voir nombre de cellules-OBIS errer, explorer des territoires, des Lost Emeries situés bien loin des lieux qui les ont vu naître. C’est même à partir de ces errances et aussi de déplacements programmés pour des raisons vitales, qu’au cours de son histoire l’homo sapiens s’est décliné en de multiples formes bioculturales sur toute la surface de la Terre et sous tous les climats. L’homme formerait alors une nouvelle couche sensible et particulière sur l’épiderme ancien. L’âge d’homo sapiens : 200 000 ans ; l’âge du vivant : 4 milliards d’années environ. La MS est sans doute antérieure.
Il est une chose particulièrement émouvante dans le monde du vivant, et surtout chez homo sapiens, celle de constater que les processus les plus créatifs, les plus fiables et les mieux adaptés découlent toujours des morphes les moins adéquates, des comportements les plus malhabiles ou les moins policés, et les plus apparemment fragiles. Ce qui me fait quelque peu douter de la partie « sélection » des théories de Darwin. Je pense que le plus « fort », le plus viable, le plus adapté, le plus intelligent, peut éventuellement jaïr par mutation hasardeuse, chez la plante, chez l’animal et également dans les sociétés humaines, les Lost Emeries, mais je pense que le plus généralement l’adaptable se construit à partir de l’effort, par l’autocontrainte, par une intentionnalité têtue et opiniâtre. La force du plus est engrainée dans le moins du faible. Elle est comme là, cachée et présente, virtuellement, elle est prête ; elle est telle une chrysalide fascinante et sacrée, reconnue par ses pairs inscients comme prémisse hautement respectable et précieux. Plus simplement dit, le plus fort est élaboré à partir du plus faible, parce qu’il y a une sorte de tolérance –reconnaissance insciente de la part du milieu environnemental, une reconnaissance de ce qui doit être malgré tout préservé et qu’il faut laisser mûrir. Le monde du vivant se travaille en soi pour s’assurer un avenir. La fameuse bactérie de François Jacob. Que penserait Mr. C. Darwin de cette vision « progressionniste »? Encore un gros mot, pardonnez-moi. Peut-être ces idées feraient-elles lever un sourcil chez un certain Monsieur de Lamarck…
En ce qui me concerne, je doute fort de la vision pour le moins mécaniste qui présente le vivant évolutif comme le théâtre artificiel de parfaites complémentarités déterminées où se jouent des rapports sans suspens entre des prédateurs « sélectionnés » qui se nourrissent de proies justement sélectionnées aussi dans le seul but de constituer de la nourriture. Et tous ces prédateurs-proies, ces mangeurs-mangés qui formeraient comme une hiérarchie pyramidale au sommet de laquelle se trouverait finalement l’être supérieur mondial qui pourrait manger tous les autres sans être inquiété. C’est face à cela que nous mène « la sélection du plus apte » si on la pense jusqu’à son terme. Il y aurait donc des êtres qui seraient fort justement élaborés pour servir de proies, de victimes, de serviteurs à d’autres… Tout ceci sent une vieille odeur de mythologie religieuse ; a des relents de XIXème siècle. Ma version c’est qu’au fil des millions d’années qui ont été nécessaires pour élaborer tout ce qui se manifeste dans le vivant, tout n’a pu évoluer que dans l’erreur, l’à-peu-près, l’approximatif, la maladresse et, en même temps l’efficacité, mais une efficacité qui n’a pas été systématiquement utile. Je pense que beaucoup de l’efficace est gâché, perdu, et qu’en outre, beaucoup de comportements involontaires, beaucoup de ratés engendrent de l’efficace. De plus, le vivant est une histoire collective ; ce qui signifie que les unités comportementales roulent en fait pour leurs organisations et que ce sont bien les systèmes qui engendrent les unités distinguées qui les constituent. Ce n’est pas moi qui récolte ce que j’ai semé en bien, ou…en mal. Tellement d’OBIS existent dans des moules sociétaux qui ne sont pas à la mesure de leur être historique, et tant d’autres ne font que l’effort de se coucher dans le lit qu’ils ont trouvé tout fait… Rien ne finit jamais de se construire chez l’homme, la femme. Dès la naissance, tout doit être brassé, repris, confronté, comparé, justifié. Tout l’être est comme un noyau entouré de plein de « bruit » qui doit être trié, mixé et remixé, puis transmis, diffusé, proposé dans l’environnement sociétal. Tout OBIS est un produit-producteur et doit vendre sa musique afin d’en débarrasser son soi-noyau pour que celui-ci s’ouvre et germe. Tout individu humain se doit de se construire et pour se faire doit s’affranchir, se désaliéner et couper tous les fils qui l’emprisonnent et le néantise. Combien y parviennent ? Combien d’OBIS ne font qu’être utiles et ne deviennent pas leur être, se contentent d’exister en tant que machines citoyennes. Si je vis c’est parce que je contribue directement à faire vivre mon Lost Emery. Si je protège les coccinelles dans mon jardin c’est parce qu’elles se nourrissent de pucerons. Mes coccinelles ne savent pas à quoi elles doivent de se régaler de pucerons, parce que le relationnement est inscient et s’active entre des niveaux du vivant qui certes sont interdépendants, mais étrangers entre eux.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire