Un exemple de la théorie de la
bioculturalité.
Deux symboles
Yin et Yang de la civilisation Occidentale,
Salvador Dalí
et Pablo Picasso
unis par la paranoïa de notre propre Histoire.
Qu’est-ce qui pourrait
nous autoriser à rassembler, à mettre en correspondance deux artistes, deux peintres
comme Salvador Dali et Pablo Picasso ? Est-ce parce qu’ils sont à la fois tout deux
espagnols et contemporains de la même période historique, culturelle, de notre
civilisation ? Non, ces éléments ne
peuvent nullement peser suffisamment pour une telle mise en correspondance bien qu’ils y contribuent en partie.
A
vrai dire, ces deux figures mythiques de l’art pictural moderne sont très différentes et éloignées l’une de l’autre,
dans leurs styles respectifs comme dans leurs discours, mais Dali et Picasso se complètent dans ce qui apparaît comme une même fonction, un
message collectif commun qu‘ils lèguent à la postérité et que je tente de
traduire dans le cadre de ma Psychanalyse Bioculturale.
Oui, il y a bien une mise en lumière par la mise en image peinte de la part de
ces deux géants de l’art du XXème s. sur l'état d'évolution de nos sociétés. Mais il est nécessaire,
pour bien saisir le propos, de se reporter à l’aspect mythologique de la conscience humaine. Si l'on prétend procéder à une analyse de cette conscience collective qui apparaît et s'anime à travers ce que l'histoire a retenu et que l’on peut par conséquent considérer par ce que les générations ont sélectionné et reconnu comme en correspondance avec leurs aspirations, il faut considérer ces rétentions comme une oeuvre collective, commune à tous les humains. Cette construction sociétale qui s'est élaborée siècle après siècle, cette oeuvre commune, se traduit par des œuvres artistiques, qui expriment l'état de la société au moment où ces artistes élaborent leurs oeuvres. Et le portrait implicite établis par Picasso et Dali de la culture Occidentale au 20è s. correspond à un message; il révèle, selon moi, le vide, le non sens et la barbarie de notre
histoire. La laideur plate des toiles de Picasso et la beauté surréaliste des tableaux de Dali expriment une absence
totale d’éthique, de spiritualité; imagent à la fois la menace et la violence de notre civilisation, à travers des styles très différents et très complémentaires.
Voyons comment peut-on repérer chacun des deux artistes en tant
qu’OBIS (Organisme Biocultural Identitaire et Sensible), au
niveau de leur anthropologie physique.
Picasso est petit, trapu; il dégage une force
physique carrée, parfaitement
stable, solide sur ses jambes musclées. Il est chthonien, c’est un pur produit
de la Terre-Mère. Picasso est une incarnation qui
fascine par sa puissance, toute concentrée dans son incroyable regard. Il
m’apparaît, tel un taureau fougueux et
clairvoyant et les biographies écrites à son sujet confirment cette vision. Les oeuvres de Picasso portent fort nettement cette marque massive et compacte, ce poids.
Dali, c’est l’élégance aérienne du flamand
rose, qui lui confère une capacité de légèreté et de mouvement, de fantaisie raffinée que nous pouvons constater dans son anatomie et son allure tout comme dans le style de ses
représentations picturales. Il est cultivé, curieux de sciences, c’est un
intellectuel romantique qui se complait dans une mythologie du rêve, où le
virtuel et l’abstrait dominent.
O
combien l’un et l'autre ressemble à sa peinture! Ressemblance pouvant être qualifiée de correspondance bioculturale. En effet, Pablo Picasso exprime largement ses croyances
primitives et superstitieuses, confinant à un animisme quasiment avoué, qui est paramétré par la bioculturalité africaine, ancestrale et magique dont il est fervent. La paranoïa qui se
dégage de cette synthèse Blanc-Noir est très pure, très spontanée, très brutale. L’œuvre
de Picasso agresse le regard, transperce comme une lance, et fait saigner l’âme du
spectateur sensible, comme celle de ses modèles féminins.
Quant à la paranoïa
dalinienne, elle nous offre, à l'opposé, dans sa spécificité aristocratique, la courtoisie
d’être dans la narration esthétiquement parfaite, elle est explicite dans sa forme
littérale, elle caresse le regard de celui qui contemple ses oeuvres. Chez Dali, la paranoïa et la barbarie de
notre civilisation est toute entière stipulée sous ses deux formules aigres douces. Les deux sécrétions
collectives et culturelles que représentent Dali et Picasso et qui ont très exactement traduit le monde du 20ès. ont tout à fait logiquement été hissées au firmament des génies médiatiques et ont de ce fait connu de leur vivant un succès à l'échelle planétaire.
Dans
la majeure partie de son oeuvre achevée, Salvador Dali, matérialise la
sophistication et la perversité de notre
culture. Son raffinement mou et voluptueux où le temps n’a pas le temps : les
montres, objets élasto-mathématiques fondant de désir pour les mécaniques célestes. Dans ces
représentations très belles, Dali fait état de la complexité cosmique dont
l’homme est issu. Ici, l’Univers
s’inscrit à travers l'homme dans une matérialité servant à soutenir ( les béquilles ) un
humanisme et une spiritualité en liquéfaction et/ou en putréfaction
permanente : la soupe galactique des physiciens.
Salvador est un produit
biocultural classieux; un romantique anarchiste envoûtant, qui donne et qui
invite, qui charme et attire l’œil, d’une manière toute féminine. Je le
dis Yin.
De
son côté, Pablo, « l’Africain », Pygmée hypnotique, farouche et carré, montre,
à sa façon abruptement schématique, crue et primordiale, ce même 20 è. siècle,
ces mêmes temps modernes, cette même civilisation, dans toute sa cruelle trivialité et sa « pauvre »
condition où, les individus ne sont que des esquisses humaines. Les
visages de ses portraits grimacent affreusement la souffrance existentielle,
torturés, qu’ils sont par leur avidité aveugle et pulsionnelle de consommateurs violents, obèses et infantiles. La barbarie…toujours. Je dis Picasso Yang.
Salvador,
dans sa générosité démonstrative nous donne à contempler notre miroir, tout en
suggérant une beauté et une grandeur possible. Picasso, nous indique
notre état actuel et donc à partir de quoi il faudrait se construire une image
collective autre.
Le discours qui se dégage de l’œuvre de Pablo
Picasso nous a-somme en nous informant dans nos profondeurs, du très très long
chemin qui nous sépare d’un monde humain beau et harmonieux.
Comment
ne pas comprendre, à la lueur de ce libre et personnel décryptage, que nos
sociétés occidentales sont autant “ picadaliennes “ que “ dalissotiques” !!?...
Mais déjà, je vois se profiler l'exemple d'un certain
Francis Bacon, qui, curieusement, me paraît bien représenter la synthèse
Picasso-Dalí d’un XXIième s. émergeant....
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