dimanche 7 mars 2010

A la recherche du chaînon manquant

«A quoi bon les loupes et les microscopes? Les véritables verres grossissants, ce sont les fleurs elles-mêmes . Il nous faut les contempler jusqu'au moment où elles deviennent transparentes, comme des lentilles, et nous verrons alors, derrière elles, au foyer de la gerbe des rayons, une lumière: la splendeur de la semence spirituelle, qui n'a aucune étendue. Telle est la véritable plante originaire. Quand le monde nous semble vaciller sur ses bases, un regard jeté sur une fleur peut rétablir l'ordre». 


Ernst Jünger s'inscrit ici dans une tradition qui remonte à Goethe. Ce grand poète fut aussi un biologiste, un biologiste en rupture aussi bien avec la science de son époque, déjà mécaniste qu'avec la tradition finaliste. Au lieu de réduire la vie à ses éléments pour établir ensuite les lois de sa croissance, Goethe part des formes achevées de la vie - les fleurs dans les plantes - et mettant à profit une intuition englobant la matière et l'esprit, il parvient après de nombreuses études comparées à entrevoir la Urpflanz la plante originaire, c'est-à-dire la forme spirituelle qui est à l'origine de la totalité des plantes. 


Goethe aurait-il ainsi eu à la fois l'intuition que le génome est une forme, une structure, donc une réalité spirituelle - et celle de l'évolution des plantes à partir d'une souche commune?

Il importe surtout de mettre en relief le fait que pour Goethe, tout était oeuvre d'art et qu'à ses yeux un même principe créateur, la vie, était à l'oeuvre dans les plantes, les animaux, et les auteurs de tragédie ou de symphonie. Goethe a lui même parfaitement résumé sa vision du monde et de la vie, quand il a dit à propos de la musique de Mozart: que Dieu, après avoir créé le monde, avait dû éprouver la joie de celui qui écoute la musique de Mozart. 
(http://agora.qc.ca/reftext.nsf/Documents/Machine--Le_mecanique_et_le_vivant_par_Jacques_Dufresne)


Et si, à l'instar de Goethe, nous partions de l'homme en tant que forme la plus "achevée" -- nous dirions aujourd'hui la forme la plus complexe -- de la vie, nous parvenions à découvrir ce qui représenterait une sorte de Urpflanz de la conscience originelle, celle que les peuples premiers auraient, semble-t-il, conservé jusqu'à nos jours et qui les aurait préservé des affres de la civilisation, ne retrouverions-nous pas alors, grâce à elle, la capacité de construire des cadres de relations à la mesure des temps nouveaux? C'est à la recherche de ce chaînon manquant, de ce lieu de culture encore inconnu qui, une fois discerné, pourrait s'intégrer à nos systèmes sociaux en crise permanente, afin de leur donner un peu plus de sérénité, un peu moins d'hystérie, un peu plus d'élégance et de dignité.



1 commentaire:

Anonyme a dit…

merci infiniment

j'ai parcouru cet excellent écrit, notre conscience est là pour nous construire un monde universel où l' émotion doit déborder à chaque seconde passée, l'humanisme est notre réponse, le poète affine ce qu'il sent, ce qu'il prévoit afin de graver un tableau , des codes symboliques , il édifie une communication entre l'esprit et l'entourage planétaire relié à un amour passionnel de la vie (faune, flore...l'air, l'eau, feu, terre, ciel =les lois cosmiques de l'univers inter-sidéral

mes amitiés
véronique benzazon

Fondements culturels des configurations de la conscience cognitive et morale de la civilisation occidentale. Analyse et ressorts des mentalités du monde globalisé. Les relations et comportements humains, les rapports humain/Nature, les traces et stigmates de l'Histoire de nos sociétés. Les limites de la croissance industrielle. L'écologie ,l'évolution et l'avenir du monde...