Entre le matérialisme confessionnel qui consiste, à l’intérieur des cultures industrialisées, à porter un culte à l’objet de consommation, et les croyances traditionnelles des cultures ethniques __ où l’argent ne fait pas loi __, y a-t-il une place où établir les fondements de mentalités qui ne seraient plus conditionnées par la mythologie ?
Une culture réaliste où les besoins essentiels ne seraient pas instrumentalisés par les compétitions de la rentabilité.
Que devons-nous entendre par besoins essentiels ? Nous sommes tentés de répondre : Tout ce qui peut éviter des sentiments de vide, de frustration.
Les besoins du corps. Faudrait que s’organise dans les populations une résistance face à la consommation pulsionnelle et addictive. Au lieu de cela nous n’entendons que des récriminations pour le pouvoir d’achat. Depuis quelques jours des idées fort contradictoires résonnent dans les medias. On nous annonce d’une part que les gouvernements transfèèrent des sommes colossales vers les banques afin que les crédits aux ménages se débloquent, et en même temps on déplore le surendettement qui gangrainent les budgets des familles.
La consommation addictive __ qui ne concerne pas exclusivement « ceux qui ont les moyens », peu s’en faut __ concerne des achats qui n’ont aucune substance, bien que correspondant à des dépenses bien réelles. Au plan existenciel il n’y a rien a obtenir de la part d’objets qui cessent très vite de nous intéresser et que l’on range dans des placards, des commodes et dans des cartons déjà remplis,
En fait ce genre de dépendance à la finalité du neuf dans son sac griffé, n’apporte qu’une satisfaction sur le moment et ne se justifie que par elle-même. Un place de cinéma n’en donne pas plus mais son avantage tient dans le caractère virtuel du plaisir qu’elle apporte.
Ce ne sont point les superflus rares et indispensables qui sont mis en cause ici, mais il est question de dépenses qui nous font dire le lendemain même : « Je ne sais vraiment pas pourquoi j’ai acheté ce truc-là ».
Certes, notre urbanité est un piège à tentations. Mais est-ce une raison pour nous retrouver en surendettement, face à une réalité mathématique qui nous rattrape immenquablement et ne fait que rajouter une pauvreté morale à notre modeste situation économique.
Le statut dún consommateur surendtté inscrit officiellement à la Banque de France, la BF, institution qui prend en charge l’épuration des dettes, n’est pas réellement catastrophique ; et on peut dire que la reconnaissance de ce statut __ de victime __ offre au débiteur un confort pour le moins inespéré. En fait les sommes dues aux organismes de crédits sont globalisées et leur remboursement se trouvent considérablement étalé dans le temps, ce qui a pour effet de réduire les mensualités à un niveau largement gérable. Ce processus m’appara^t comme consensuel dans un système de société basé sur la production-consommation où l’économie est fondée sur la capacité des ménages à permettre à l’industrie et au commerce de générer de la richesse.
Ainsi, le statut de surendetté n’est rien de moins qu’un équivalent implicite d’une augmentation du pouvoir d’achat des ménages. Si nous pouvons vivre et consommer au-dessus de nos capacités de salaires et de revenus, cela revient à la même comptabilité que si nous effectuions nos achats en les payant cash avec des revenus deux fois plus élevés. Ainsi on assiste à une forme implicite et non officielle de redistribution des profits générés sur le territoire national. Les salaires restent au minimum et cependant on entretien chez le smicard l’illusion d’une relative aisance dont il peut se contenter.
Que se passe-t-il dans un tel contexte de faux semblants sociaux économiques ?
Les citoyens aux revenus modestes n’ont pas culturellement, traditionnellement accès aux produits et services de luxe. Lorsque le loyer ou la mensualité relatve au logement et lorsque l’enveloppe alimentation est constituée ; lorsque toutes les charges de consommation d’énergie sont payées, il ne reste plus grand-chose pour les « petits » superflus qui font toute la différence entre une vie perçue comme épanouissante et gratifiante, et une existence perçue comme grise, ^late et morne. Il faut donc compenser la réalité modeste (morne), concrète, par une lumière virtuelle qui nous porte au-delà de l’impuissance, nous porte à fantasmer. Ce n’est point un hasard si la lupart des dossiers de surendettement portent sur des achats de matériels multimédias comme téléviseurs, chaîne HI-FI et automobile ; ce sont des produits d’évasion, à très forte mythologie ajoutée. De ce fait, les personnes à revenus modestes ne gagnant pas assez pour effectuer des croisières sur des navires luxueux, des voyages fréquents par avion, pour payer des notes de restaurants 4 étoiles ou acheter des véhicules grand sport et pour s’habiller chez les grands couturiers, supportent leur existence partagée entre l’atelier, l’usine et leur petit logement, grâce à l’écoute de musique, au cinéma et…à la TV, l’instrument indispensable au bon ordre social. Il faut y ajouter l’internet, qui, en matière de virtualité, est le champion toutes catégories !
Tout est bien orchestré pour que le modeste contribue à faire fonctionner la machinerie industrielle et commerciale au lieu de constituer des capitaux d’épargne.
Ce qui serait utile, en tous les cas, moins artificiel __ et donc économiquement plus sain __ lors d’une procédure d’inscription en BF, c’est que soient confisqués tous les objets impayés, jusqu’à ce que tous les crédits soient remboursés. En outre, il serait prudent de faire prélever directement sur la fiche de paie, les impôts sur le revenu, ainsi que toutes les charges à propos desquelles le citoyen surendetté serait engagé. Autrement dit, il serait bon de ne laisser disponible seulement ce qui correspond au solde du ou des comptes.
Mais veut-on réellement obtenir des comportements responsables dans nos sociétés ? Nous avons de quoi en douter. Au plan de la consommation il semble plutôt qu’il y existe un consensus général pour entretenir une dépendance consumériste au sein des populations que l’on traite comme une source de profits.
Au regard des dernières nouvelles économiques, il semblerait que ces systèmes qui ne visent qu’aux profits à cours terme, donnent la preuve de leur artifice et de leurs fondements illusoires. Il serait bon, au niveau gouvernemental, de sensibiliser les organismes de crédits, les banques, vers de nouveaux concepts plus en rapport avec les règles d’une économie réelle, d’une économie productrice de richesse, une économie fondée sur des profits de biens, de services exportés. Au lieu de faire fonctionner les machines à billets, il serait plus sain qu’une nation, un pays, se donne la peine d’aller chercher son succès économique et ses revenus, en dehors de ses frontières.
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